Les déclarations du président américain Barack Obama, qui condamne les opposants à l'accord sur le nucléaire iranien en des termes dont le ton antisémite fait frémir, ont montré que même les partisans du président et de l'accord qu'il est en train de promouvoir ont été pris de court par le caractère nocif de ses paroles et de sa campagne. Le discours du président à l'Université américaine dans lequel il a livré son dernier plaidoyer en date en faveur de l'accord avec l'Iran avant de partir à nouveau en vacances, a été magistralement déconstruit par Dennis Prager. Dans ce discours, les arguments développés par le président étaient presque tous erronés.
Malgré le tam-tam de l'administration, la guerre n'est pas la seule alternative au piteux accord que le Secrétaire d'État américain John Kerry a ramené après avoir cédé face à ses homologues iraniens sur pratiquement tous les points majeurs des négociations dans le but de donner quelque chose à signer à Obama.
En réalité, tous ces milliards de dollars de fonds gelés prêts à être libérés en faveur de l'Iran, ont accru la probabilité d'une guerre entreprise par l'Iran au moment où ce pays intensifie son soutien aux terroristes visant Israël, les nations arabes sunnites et plus encore. Il est certain que, aussi bien avant que pendant ou après les négociations, une action militaire des États-Unis contre l'Iran n'a jamais été une véritable option sous la présidence d'Obama, que ce soit avec ou sans la conclusion d'un accord et que ce soit avec l'assentiment ou le rejet du Congrès. Le rejet d'un accord par le Congrès n'augmenterait en rien la probabilité selon laquelle ce président irait en guerre contre l'Iran. Cela a toujours été évident pour l'Iran qui a vu la nation la plus puissante du monde venir mendier comme un chien affamé en quête de nourriture ou au moins d'un geste bienveillant. Il était tout à fait logique pour l'Iran de demander continuellement un allègement toujours plus grand des sanctions ou des inspections sachant que, les Américains étant prêts à tout pour obtenir un accord, il n'y aurait pas de bâton pour compenser la carotte des concessions. En aucun cas nous ne nous serions retirés des négociations ni n'aurions frappé les installations nucléaires iraniennes.
Cette semaine a vu se manifester un nouveau signe de l'acharnement avec lequel cette administration a fait de l'Iran son nouveau partenaire. En effet, nous savons à présent que John Kerry, alors sénateur, a été envoyé courtiser les Iraniens dès 2011 alors que le négationniste Mahmoud Ahmadinejad était encore président plutôt que sous la présidence de son successeur, Hassan Rouhani, apparemment plus modéré. Les négociations n'avaient donc rien à voir avec une quelconque volonté de la part de l'Iran de montrer un nouveau visage et de s'ouvrir à l'Occident. Kerry s'est présenté avec une première offre permettant à l'Iran de poursuivre son enrichissement nucléaire même en cas de blocage pour un accord. Autrement dit, si vous aimez votre programme nucléaire, gardez-le. Rien de tel que d'abandonner tout ce que vous avez pour laisser aux voleurs l'occasion de tout vous dérober.
Un rejet de l'accord par le Congrès américain signifiera que les sanctions américaines resteront en place, que les autres pays et les compagnies étrangères cherchant à faire des affaires avec l'Iran devront veiller à ne pas enfreindre ces sanctions, que le boni de 100 milliards de dollars des avoirs gelés tant attendu par l'Iran ne sera pas entièrement libéré et que les États-Unis seront plus libres (en présumant que son président, ou peut-être son successeur, y a une once d'intérêt) pour prendre position et réagir face à l'agression iranienne potentielle où qu'elle se produise à l'avenir.
Malheureusement, rien de tout cela importe pour les démocrates loyalistes de la Chambre et du Sénat qui en ont conclu que s'opposer à un président issu de leur parti sur un sujet qu'il considère comme important demande bien plus de courage que ce dont ils ont jamais fait preuve. Le président qui est apparu en campagne comme un rassembleur et non un diviseur a réussi dans tous ces dossiers à unir les démocrates contre les républicains et a travaillé dans le même sens en ce qui concerne Israël. Mais à présent, la bataille se situe au sein des démocrates, où l'on voit le président montrer son ressentiment à l'égard des démocrates qui osent le défier et parmi lesquels se trouve le sénateur de New York Charles Sumer, troisième démocrate le plus important au Sénat. Depuis sa résidence d'été du Martha's Vineyard, le président fait chauffer les téléphones pour s'assurer que l'opposition de Schumer, soigneusement expliquée dans une lettre détaillée, ne va pas enfler au point de menacer l'accord. Le porte-parole de la Maison Blanche, Josh Earnest, a presque reconnu que la Maison Blanche ne serait pas surprise (et pourrait même se réjouir ?) de voir une opposition à ce que Schumer devienne le chef de file démocrate au Sénat après la retraite de Harry Reid. Earnest a indiqué de façon tout aussi désinvolte que Schumer et Obama s'opposent depuis plus de 10 ans (le vote sur l'intervention en Irak est apparemment à l'origine de ce différend) même si de tels différends n'ont jamais empêché Obama d'offrir des postes à Hillary Clinton, à Kerry ou au vice-président Joe Biden qui avaient pourtant tous voté en faveur de la guerre en Irak.
La capacité à induire en erreur et à mentir effrontément est devenue un élément clé du job des politiciens, une raison parmi tant d'autres qui explique leur commune impopularité. Le fait qu'Obama est bien meilleur dans les deux pratiques que la plupart des autres politiciens explique pourquoi il a beaucoup plus progressé dans sa carrière que la plupart de ses contemporains. On perçoit actuellement le véritable risque pour Hillary Clinton de voir s'effondrer sa campagne présidentielle. Si cela devait arriver, il faudrait en attribuer la cause à l'opinion d'un grand nombre d'électeurs qui la considèrent comme une vulgaire menteuse en qui on ne peut pas avoir confiance. Obama, par contre, est passé maître dans l'art de diaboliser ses opposants et d'inciter ses partisans à faire de même, si bien que tout désaccord politique est davantage perçu parmi les opposants comme un problème de personne.
La campagne menée contre les opposants à l'accord avec l'Iran a révélé un autre aspect de la personnalité du président qui en est à présent à sa septième année de mandat. À ce stade, Obama semble incapable d'accepter le simple fait que certains contestent ses instructions et ses explications. Si ces derniers s'opposent à lui, ce doit être parce qu'ils se trompent toujours quand il s'agit de politique (d'où, moins intelligent et réfléchi que le visionnaire omniscient), parce que ce sont des traîtres (plus dévoués à Israël qu'à l'Amérique), des racistes (opposés à tout ce qui vient d'Obama principalement en raison de sa race), des va-t-en-guerre ou des gens qui ne savent pas de quoi ils parlent (ils n'ont certainement pas lu l'accord ou écouté les membres de l'administration qui ont défendu l'accord). Il y a un mépris à peine déguisé pour quiconque montrerait son opposition. Il est probable que le président continue à gagner jusqu'à ce stade – ce qui signifie qu'il sera difficile d'obtenir une majorité des deux tiers dans les deux assemblées du Congrès pour passer outre le véto présidentiel. Mais la victoire ne semble être qu'une partie de son projet car ce qu'il semble vouloir, c'est écraser ses opposants, que ceux-ci appartiennent au camp démocrate ou au groupe bipartite American Israel Public Affairs Committee (Comité américain pour le Affaires publiques israéliennes). Comme l'a écrit Bret Stephens, le président a la suprême certitude qu'il a raison et que toute personne qui ne pense pas comme lui, a tort. À aucun moment, il ne doute de lui-même.
Dans son discours de la semaine dernière à l'Université américaine, Obama a dit : « Quels sont ceux qui soutiennent l'accord ? Il s'agit de l'ensemble unanime du Conseil de sécurité de l'ONU, de la majorité des « experts en matière de contrôle et de non-prolifération des armes », de « plus de 100 anciens ambassadeurs » et de « toute nation dans le monde qui l'a publiquement déclaré » - à l'exception d'une seule.
Bref, les forces du Bien, les enfants de la lumière, les 99%.
Et qui est contre l'accord ? Une majorité « virulente » de républicains. Des lobbyistes qui financent à coups de dizaines de millions de dollars une campagne d'opposition à l'accord. Les pontes et les sectaires. Les va-t-en-guerre. Les gens qui se sont trompés sur l'Irak. Les partisans de la ligne dure dans le Corps des gardiens de la Révolution en Iran. Et un peuple à la nuque raide, Israël, qui n'est pas assez sage pour voir à quel point cet accord leur est profitable.
En d'autres termes, ce sont des bouffons ou des simples d'esprit plongés dans les ténèbres de l'ignorance ou délibérément mauvais qui s'opposent à un accord dont les vertus naturelles devraient être aussi évidentes que celles des céréales complètes ou d'une bonne nuit de sommeil.
Quand votre objectif est de transformer votre pays et le monde, rien ne peut interférer dans votre projet d'édification.
Le fait qu'Obama est peut-être allé trop loin dans son discours à l'Université américaine et dans les réactions de son administration à l'annonce de l'opposition de Schumer, est prouvé par certains de ses partisans qui tentent de minimiser la part la plus abjecte de ses fulminations. Même les libéraux s'énervent quelque peu quand leur président laisse peu de doute sur le fait qu'il approuve les propos du nationaliste Pat Buchanan disant que ce sont toujours les juifs américains à la solde d'Israël qui conduisent les États-Unis à la guerre ou que les chantres de la disparition de l'Amérique en Iran pensent la même chose que les républicains à propos de l'accord sur le nucléaire. Les chantres de la disparition de l'Amérique ne sont évidemment rien de plus que les suppôts du régime iranien et aucun négociateur iranien n'a jamais agi en dehors du contrôle des mollahs. Les chantres de la mort de l'Amérique sont en réalité sur la même longueur d'onde que le président puisque leurs patrons viennent de conclure un accord avec Kerry.
Les excès de langage commis à la fois par les partisans et les adversaires de l'accord ont suscité chez de nombreux détracteurs de l'ignoble discours présidentiel une réaction prudente visant à renvoyer dos à dos les deux Chambres du Congrès. Mais les termes apocalyptiques employés à propos de l'accord avec l'Iran par Mike Huckabee, candidat républicain à la présidentielle situé actuellement à 4 % d'intentions de vote et n'ayant virtuellement aucune chance de remporter l'investiture, ont-ils autant d'importance que les mots du président des États-Unis ?
Un ancien membre de l'administration et nouveau dirigeant de l'Anti-Defamation League, Jonathan Greenblatt, semble avoir été réellement blessé par les accents antisémites du discours présidentiel : « Dans le cadre du débat sur l'accord avec l'Iran, l'administration est tombée par moments dans des clichés qui, aux yeux de nombreux membres de la communauté juive, rappellent certaines accusations malveillantes à l'encontre des juifs... »
« Par ailleurs, des affirmations selon lesquelles les opposants à l'accord proposé sont "ceux-là mêmes qui nous embarqués dans la guerre en Irak" rappellent à de nombreux juifs américains des reproches éculés contre ce "lobby juif" qui aurait encouragé toutes les politiques funestes au Moyen-Orient. Pourtant il n'y avait pas d'unanimité au sein de la communauté juive concernant la guerre en Irak et cette communauté n'a joué en aucun cas un rôle prépondérant dans la décision de l'administration Bush de déclencher la guerre. À vrai dire, de nombreux juifs américains préoccupés par cet accord avec l'Iran étaient en fait opposés à la guerre en Irak et s'irritent face aux accusateurs qui disent : « Ils se sont trompés par le passé, ne les écoutez pas aujourd'hui. »...
« Cette situation s'est aggravée par le fait que les opposants à l'accord avec l'Iran sont catalogués comme des défenseurs de la guerre. Au sein de la communauté juive, les opposants à l'accord entendent cela comme une insinuation selon laquelle les juifs cherchent de nouveau à entraîner les États-Unis dans une guerre qui pourrait desservir les intérêts américains au profit des seuls intérêts israéliens. Que l'on soit pour ou contre l'accord, il est injuste d'insinuer que les opposants à l'accord défendent l'option de la guerre. »
Après avoir défendu bec et ongles son discours, le président a un peu levé le pied depuis quelques jours, reconnaissant qu'il y a du pour et du contre dans les deux camps. Mais un tel changement ne peut avoir qu'une explication : il se peut que le président ait nui à ses efforts de persuasion de certains démocrates toujours indécis et se soit créé de nouveaux opposants. Car ce qu'il désire encore et toujours, c'est vaincre et détruire ses opposants. C'est la seule manière d'agir qu'il connaisse. Décidément, il a passé beaucoup trop de temps à Chicago.