D'un côté, nous avons un mouvement djihadiste qui recherche la domination globale en décapitant des journalistes, en jetant les homosexuels du haut des toits et en massacrant toute personne perçue comme un ennemi qui l'entraverait dans son entreprise de restauration d'un grand État islamique.
Face à cela, nous avons un État souverain, refuge d'un peuple menacé d'extermination à plusieurs reprises au cours de l'histoire, mais aussi fournisseur de traitements médicaux aux Syriens victimes d'attaques de la part du régime d'Assad et des terroristes de l'État islamique.
Que l'on combatte pour l'un ou pour l'autre constituerait apparemment une menace similaire. C'est en tout cas ce que dit Hussam Ayloush, directeur de la section de Los Angeles du Council on American-Islamic Relations (CAIR, Conseil pour les relations islamo-américaines). Le mois dernier, alors qu'il s'exprimait au Centre islamique du comté d'Orange à propos des mesures destinées à « lutter contre l'extrémisme violent », Ayloush a confié qu'il n'appréciait pas le fait que l'attention se concentre sur la communauté musulmane :
Vous savez, on n'entend rien sur la lutte contre l'extrémisme violent en rapport avec ces milliers d'enfants juifs américains rejoignant cette armée israélienne qui tue des gens à Gaza. Quand a-t-on vu le Département américain de la sécurité intérieure ou le FBI prendre contact avec la communauté juive pour lui demander de lutter contre ce phénomène ? En réalité, les juifs américains partis rejoindre l'armée israélienne sont bien plus nombreux que les musulmans américains partis rejoindre l'EIIL.
Dès lors, il faut parler des enfants juifs américains qui rejoignent l'État juif avant de parler des musulmans américains qui rejoignent l'État Islamique. Car ni l'un ni l'autre ne représente le judaïsme ou l'islam.
Ayloush a fait ces observations lors d'un forum qui s'est tenu le 9 janvier, le jour même où, à Paris, les assauts de la police mettaient fin à l'opération terroriste. Ses propos ont été enregistrés par Gary Fouse, professeur adjoint à l'université de Californie, qui a écrit à leur sujet sur son blog.
Ainsi, moins d'un jour après qu'Ahmedy Coulibaly eut pris d'assaut un supermarché casher de Paris et tué quatre personnes, Ayloush soutenait que les juifs américains qui partent en Israël pour y rejoindre l'armée sont tout simplement aussi mauvais que les vils terroristes de l'EIIL. Une vidéo diffusée peu après l'attentat montre Coulibaly faisant allégeance à l'EIIL.
Ayloush n'est pas le premier à faire cette comparaison. Le 15 septembre, Zahra Billoo, une collègue d'Ayloush au bureau du CAIR à San Francisco, a indiqué sur Twitter qu'elle « se demande qui a recruté le plus d'Américains ? L'armée israélienne ou l'EIIL ? »
Mise à jour, 19 février : Billoo a au moins le mérite de la constance puisque dans un autre message posté sur Twitter le 16 février, elle faisait à nouveau la même comparaison entre l'EIIL et Tsahal, tout en se demandant : « les deux groupes génocidaires sont-ils différents l'un de l'autre ? »
Au cours de la convention de l'Islamic Society of North America (ISNA, Société islamique d'Amérique du Nord) qui s'est tenue l'été dernier à Détroit, Billoo s'exprimait avec force lamentations au sujet du Dôme de fer, le système de défense antimissile israélien qui a abattu des dizaines de roquettes tirées à la fois par le Hamas et d'autres groupes terroristes sur des populations civiles. Elle disait : « Dans la région de la Baie, où nous avons des élus parmi les plus progressistes de tous les États-Unis, on n'en trouve qu'un seul à avoir voté contre ce système de défense appelé Dôme de fer. »
Ah ! Si seulement le Dôme de Fer n'avait pas été mis au point, si seulement davantage d'Israéliens avaient trouvé la mort.
En dehors de cela, qu'est-ce qui pourrait faire dire de telles choses à des gens intelligents ?
Comment peut-on comparer un État démocratique qui fonctionne, qui appelle systématiquement les gens à évacuer une zone avant de frapper celle-ci, un État dont les citoyens arabes ont bien plus de droits individuels pour le choix de leurs représentants que la plupart des pays musulmans dans le monde, comment peut-on comparer cet État à une idéologie de mort qui semble mettre toute son énergie à tuer de la manière la plus choquante et la plus dépravée qui soit ?
Réponse : une haine aveugle.
Le Jerusalem Post a suivi un Américain parti rejoindre Tsahal en Israël. Considérez cet homme, lisez son histoire et voyez s'il provoque la terreur en Occident.
Ayloush n'est pas un personnage de second plan. Au lendemain de ses propos comparant les Américains rejoignant l'EIIL à ceux rejoignant l'armée israélienne, il annonçait son élection au comité exécutif du District 60 du Parti démocrate en Californie.
En comparant Tsahal à l'EIIL, Ayloush a dû oublier la tirade qu'il avait lancée en novembre 2013. Alors qu'on lui demandait s'il condamnait le Hamas et le Hezbollah en tant que groupes terroristes, il a refusé de répondre à la question, jugeant celle-ci hors de propos. Le CAIR est un organisme de la société civile, a-t-il dit, et « nous n'avons pas à être impliqués dans les questions touchant le Moyen-Orient ni dans les conflits qui s'y passent. Nous sommes une organisation américaine. »
Cette question « prouve que vous n'êtes animés que par le sectarisme. »
Le fait de demander à quelqu'un de condamner le terrorisme du Hamas et du Hezbollah est donc hors de propos. Par contre, le fait d'établir une équivalence morale entre l'État Islamique et Israël est pour Ayloush une analyse tout à fait juste.
Il en va de même pour l'ancien correspondant du New York Times, Chris Hedges, qui dans un article publié en décembre reprenait la comparaison inepte entre l'EIIL et Tsahal. Soutenant que l'EIIL était un monstre engendré par l'Amérique en conséquence de l'invasion de l'Irak, il comparait « la quête d'un État sunnite ethniquement pur » au désir juif de création d'une patrie.
« La tactique de l'EIIL ressemble beaucoup à celle des guérillas juives qui recouraient à la violence, au terrorisme, aux combattants étrangers, aux livraisons d'armes clandestines et aux fonds étrangers, et commettaient un horrible nettoyage ethnique par le massacre de centaines de civils arabes et ce, dans le but de créer Israël. »
Ce réflexe comparatif remonte au moins à l'été dernier, au moment où Israël envoyait des troupes au sol sur Gaza pour tenter de réduire à néant l'arsenal de roquettes lancées continuellement par le Hamas contre des populations civiles. Au cours d'une conférence donnée à Toronto en décembre sur le thème « Faire revivre l'esprit de l'islam », Omar Suleiman tentait d'expliquer la fureur qui pousse les jeunes musulmans dans les bras de l'EIIL et du groupe terroriste islamiste nigérian Boko Haram. Il affirmait ainsi que cette fureur pouvait s'expliquer en partie par le fait que le mal véritable était perçu comme insuffisamment condamné.
« C'est pourquoi il importe que tout dirigeant soit en mesure d'adopter une position claire, car sinon, quel effet cela aura-t-il sur les gens ? Comme l'a dit l'imam Zaid à l'ISNA, c'est facile de condamner l'EIIL, nous condamnons tous l'EIIL, mais qu'en est-il de l'armée israélienne ? Quelle est notre position par rapport à cette dernière ?
Et si vous ne croyez pas que c'est le sionisme, ce maudit sionisme, qui constitue l'enjeu principal pour lequel on joue avec le Moyen-Orient et pour lequel on y installe des gouvernements fantoches, si vous ne croyez pas à cela, alors c'est que vous êtes aveugles. »
Quelqu'un est aveugle, très bien. Mais ce n'est pas le « maudit sionisme » qui, le mois dernier, a envoyé des citoyens français massacrer des caricaturistes et des journalistes et attaquer un hypermarché juif. Ce n'est pas lui qui a incité Boko Haram à massacrer 2000 personnes, dont la plupart étaient des femmes, des enfants et des vieillards, dans une seule petite ville. Le « maudit sionisme » n'avait rien à voir avec l'exécution par l'EIIL, l'été dernier, de 600 prisonniers chiites près de Mossoul, pas plus qu'avec le meurtre de plus de 200 sunnites irakiens fidèles au gouvernement.
Or, avec les islamistes obsédés par Israël, tout est ramené à Jérusalem.
Une liste de héros éloquente
Ces gens qui font cette comparaison fallacieuse sont ceux-là mêmes qui se rangent derrière les personnes qui aident les terroristes meurtriers, ou au moins dans un cas, qui tuent des gens dans un attentat terroriste.
Comme nous l'avons montré à l'automne dernier, Rasmieh Odeh a joué un rôle important dans l'attentat à la bombe perpétré en 1969 dans un supermarché de Jérusalem et qui a coûté la vie à deux étudiants. Quand elle est venue aux États-Unis en 1995 et qu'elle a introduit, en 2004, une demande de naturalisation américaine qu'elle a obtenue, Odeh a volontairement caché au service de l'immigration le fait qu'elle avait été condamnée pour cet attentat.
La poursuite d'Odeh en justice pour fraude à l'immigration a déclenché une campagne nationale visant à faire pression sur les autorités pour qu'elles abandonnent les poursuites. Dirigée par des amis de l'Arab American Action Network (AAAN, Réseau d'action arabo-américain), la campagne a recueilli le soutien d'organisations comme le Council on American-Islamic Relations (CAIR), l'American Muslims for Palestine (AMP, Musulmans américains pour la Palestine), l'Arab-American Anti-Discrimination Committee (Comité arabo-américain contre la discrimination) ainsi qu'un groupe de 124 universitaires féministes.
Au début du mois, nombre de ces groupes ont critiqué l'expulsion de Sami Al-Arian, un ancien professeur ordinaire de la University of South Florida qui avait secrètement fait partie du conseil de direction du Djihad islamique palestinien. Mercredi dernier, Al-Arian est parti pour la Turquie après avoir marqué son accord, dans une procédure de plaider coupable de 2006, sur son expulsion pour avoir participé à l'octroi de services au groupe terroriste.
« C'est un grand dirigeant qui part en exil », écrivait sur Twitter Lamis Deek, avocat et membre du bureau de la section newyorkaise du CAIR.
Dans un article pour Al-Jazeerah, Hatem Bazian, maître de conférences, écrivait que l'affaire « se résume en substance à une question de liberté d'expression et une déclaration en arabe qu'il aurait eue en 1988 lors d'un rassemblement contre Israël et que l'on peut traduire par quelque chose comme "Mort à Israël" ».
Il s'agit là d'une grossière erreur qui ne tient pas compte des propres déclarations d'Al-Arian qui a reconnu qu'il entretenait des liens avec le Djihad islamique palestinien et qu'il savait que ses collègues du think tank basé à Tampa – Ramadan Shallah, Basheer Nafi et son beau-frère Mazen Al-Najjar – faisaient également partie du groupe terroriste. Shallah est le dirigeant du Djihad islamique depuis 1995, un commandement qu'il a assumé quelques mois à peine après avoir quitté le think tank d'Al-Arian à Tampa.
Les affirmations de Bazian ne tiennent pas compte des éléments qui prouvent qu'Al-Arian était un membre de la direction du Djihad et qu'il a réclamé « un véritable soutien au mouvement djihadiste en Palestine » à la suite d'un double attentat suicide en 1995 qui a fait plus de 20 morts « de sorte que des opérations comme celles-là puissent se poursuivre. »
Pour Bazian, l'affaire Al-Arian prouve que « la "guerre contre le terrorisme" menée par les États-Unis et certainement par le Canada s'est traduite par une campagne visant les activistes palestiniens et les organisations proches de ces derniers… »
Cette fausse information n'émane pas d'un quelconque internaute excentrique se baladant sur les forums mais bien d'un universitaire qui donne cours à l'Université de Californie, à Berkeley, et qui participe à un programme scolaire contre l'islamophobie, l'Islamophobia Research and Documentation Project.
À l'instar d'autres partisans d'Al-Arian, Bazian n'accorde aucune espèce d'importance aux éléments qui confirment les liens de l'ancien professeur avec le Djihad islamique palestinien. Le véritable terroriste, c'est Israël. Point final.
En revanche, les véritables héros peuvent être mis de côté par les islamistes s'ils commettent le péché impardonnable de soutenir un tant soit peu Israël. Le républicain américain John Lewis, qui a risqué sa vie à plusieurs reprises pour avoir milité dans le mouvement pour les droits civiques aux États-Unis, s'est plus d'une fois attiré le mépris de Dawud Walid, membre du CAIR au Michigan.
Parce que Walid n'apprécie pas le fait que Lewis soutient Israël, l'un des plus grands représentants de la non-violence dans l'histoire de ce pays a « perdu son autorité morale ».
Mauvais sur les détails
Lors du congrès de l'American Muslims for Palestine (AMP), organisé en novembre dernier à Chicago, le vice-président de l'association, Munjed Ahmad, a été applaudi quand il a fait remarquer que l'aide au Hamas et à d'autres groupes classés terroristes est illégale mais « ce que je trouve très triste, quand on parle d'organisations terroristes, c'est que l'État d'Israël n'est pas considéré comme une organisation terroriste par notre gouvernement, alors qu'il est véritablement le plus grand de tous les terroristes. Vraiment. »
Quelques minutes plus tôt, il se demandait pourquoi les États-Unis « n'ont jamais soutenu le droit à l'autodétermination. En réalité, ils ont fait tout le contraire. Ils ont soutenu le régime qui, selon moi, est actuellement le plus tyrannique qui soit au monde. Ils ont fourni aide et soutien, financé l'armement, assuré à cet effet une couverture diplomatique et perpétré l'occupation brutale contre le peuple palestinien. »
Peut-on qualifier de régime le plus tyrannique au monde un pays qui dispose d'un pouvoir judiciaire indépendant et qui favorise la liberté de la presse ? Peut-on dire de ce pays qu'il est pire que la Corée du Nord de Kim Jong Un, pire que la Syrie de Bachar Al-Assad, pire que l'Arabie Saoudite qui décapite les criminels en public et condamne un homme à recevoir 1000 coups de fouet pour avoir exprimé librement son opinion, ou encore pire que l'Iran qui envoie en Syrie son armée par procuration, le Hezbollah, pour soutenir Assad et qui arrête des personnes telles que des universitaires et des journalistes ?
Ahmed est en droit de détester Israël plus que tout autre pays mais il n'existe aucune mesure objective qui permette de valider une vision du monde aussi absurde.
Malgré ses affirmations, les États-Unis plaident en faveur d'un État palestinien au moins depuis l'époque où Jimmy Carter était président, soit il y a près de 40 ans. Mais en lançant son appel à la création d'un pays pour les Palestiniens, Carter a précisé que les Palestiniens n'avaient « jamais abandonné leur engagement pris ouvertement de détruire Israël. Ce problème doit être surmonté. »
Le Hamas et le Djihad islamique répertoriés par les USA parmi les groupes terroristes, ont en commun, cet engagement continu pour la destruction d'Israël qui est mentionnée en toutes lettres dans leurs chartes respectives. Aucun de ceux qui qualifient Israël d'État terroriste et qui le comparent à l'EIIL, n'a demandé à ce que ces chartes soient amendées ou abrogées.
Au lieu de cela, ils condamnent la justice parce que celle-ci fait respecter la loi. Quand des poursuites sont engagées contre des personnes ou des groupes soupçonnés de fournir un soutien matériel à des groupements terroristes palestiniens, les islamistes condamnent ces poursuites qu'ils considèrent comme un scandale.
« La création de la Holy Land Foundation [Fondation pour la Terre sainte] avait pour objectif de servir de collecteur de fonds pour le Hamas » a déclaré en 2009, le juge américain Jorge Solis lors d'une audience sur le prononcé de la peine à l'encontre de cinq anciens responsables de l'association caritative. Des preuves ont montré que la fondation, connue sous le sigle HLF, faisait partie d'un grand projet ourdi par les Frères Musulmans aux États-Unis en vue de fournir au Hamas « des médias, de l'argent et des hommes. » Ces éléments indiquent combien l'ancrage des Frères Musulmans dans ce pays est important, eux qui à leur apogée, comptaient un think tank en Virginie, un organe de propagande au Texas et à Chicago ainsi que le CAIR lui-même.
C'est ce qui a incité le FBI à mettre fin à toute interaction non liée à une enquête avec le CAIR « jusqu'à ce que nous sachions s'il existe toujours des liens entre le CAIR ou ses cadres et le Hamas. »
Dans un message posté sur son compte Twitter en novembre, Zahra Billoo, membre du CAIR, qui voit dans l'armée israélienne et l'EIIL des menaces similaires, a déclaré que les personnes de la HLF qui ont été condamnées ainsi qu'Al-Arian sont ses « héros personnels ».
C'est son droit. Mais la justice a trouvé que ses héros étaient des criminels liés à des groupes terroristes. Cela en dit long sur ce qui anime tant d'islamistes qui, bien que tout prouve le contraire, considèrent Israël comme le plus grand danger du monde.