L'accord cadre sur le programme nucléaire iranien est destiné à renflouer les caisses du Trésor iranien et à permettre à la République islamique d'investir des fonds considérables dans son réseau régional d'agents du terrorisme et de la guérilla.
L'accord passé entre Téhéran et le groupe des 5+1, qui doit être finalisé avant le 30 juin, a suscité de vifs débats sur la question de savoir s'il suffira à refréner les ambitions nucléaires de l'Iran. Toutefois, en marge de ces controverses, les perspectives à court terme au Moyen-Orient semblent bien sombres.
L'allègement de sanctions économiques paralysantes offrira bientôt à l'Iran beaucoup plus de facilités pour financer sa longue liste de clients et les préparer à la subversion, à la déstabilisation et à la diffusion des conflits et du désordre dans toute la région.
Parmi ces clients, on trouve l'organisation chiite libanaise du Hezbollah – l'entité terroriste la mieux armée au monde, active dans la guerre civile en Syrie – la milice chiite des Houthis qui est actuellement en train de s'emparer du Yémen et de le déstabiliser, une kyrielle de milices chiites militantes en Irak, le groupe terroriste Djihad islamique à Gaza et en Cisjordanie ainsi que le Hamas avec lequel l'Iran a récemment renoué des contacts. Ce dernier a commencé par envoyer au Hamas, qui gouverne Gaza, des dizaines de millions de dollars pour financer ses programmes de reconstruction de tunnels de combat et de fabrication de roquettes. Et les investissements iraniens dans l'arsenal de guerre islamiste à Gaza ne feront qu'augmenter une fois les sanctions levées.
L'Iran sera également prêt à utiliser l'argent pour activer ses partenaires qui dépendent de plus en plus de son aide et qui sont soumis à ses directives. Les partenaires de l'Iran dans la région englobent le régime d'Assad en Syrie, qui a tué un nombre incalculable de civils innocents depuis le début de la guerre civile, ainsi que le gouvernement chiite irakien qui dépend du soutien iranien dans la guerre menée contre l'État Islamique.
Une fois que les sanctions internationales auront été levées, l'Iran mettra tout en œuvre pour obtenir plus de 100 milliards de dollars de fonds non gelés en réserves de devises étrangères du monde entier. On s'attend à ce que, très tôt ensuite, les compagnies internationales se précipitent pour investir en Iran. Les ventes de pétrole reprendront alors, générant ainsi de nouvelles et immenses sources de revenus.
Il est certain que la République islamique détournera une partie de cet argent pour alimenter ses nombreuses filiales à l'étranger à qui elle fournira argent liquide, entraînement et armes en tous genres : roquettes et missiles guidés pour le Hezbollah, armes à feu et projectiles pour les milices en Irak et au Yémen ou encore missiles pour le régime d'Assad en Syrie.
En dépit des sanctions, l'Iran a poursuivi ce genre d'activités ces dernières années. Il est dès lors évident que la dynamique s'accélérera considérablement si Téhéran voit l'argent liquide affluer.
L'Iran essaiera également de déstabiliser les États arabes alliés des États-Unis et dirigés par l'Arabie Saoudite et l'Égypte.
À l'instar de plusieurs éléments de l'accord sur le nucléaire obtenu jeudi dernier en Suisse, les détails sur le moment où et la manière dont le Conseil de sécurité des Nations unies annulera les sanctions contre l'Iran demeurent flous. Alors que l'Iran affirme que les sanctions seront toutes levées sans délai, les représentants du groupe des 5+1 tiennent d'autres discours.
Ces versions contradictoires sont toutefois d'un intérêt secondaire car ce qui importe, c'est que les sanctions seront bientôt levées si les pourparlers se matérialisent en accord signé. Les Gardiens de la Révolution iranienne et leur unité extraterritoriale d'opérations spéciales, les Forces al-Qods, sont actifs dans toute la région et se constituent un réseau d'agents qu'ils arment et dont ils étendent les bases opérationnelles.
Apparu lundi dernier sur une chaîne de télévision syrienne, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, reconnaissait l'importance de la levée des sanctions contre l'Iran en disant que l'accord « renforcerait le rôle de Téhéran dans la région. »
« L'Iran gagnera en force, en prospérité et également en influence », confiait Nasrallah sur la chaîne syrienne Al-Ekhbariya TV. « Cela renforcera également la position de ses alliés. »
Nasrallah a également déclaré : « Dans un avenir proche, l'Iran devenu plus fort et plus prospère sera en mesure de soutenir ses alliés, notamment la résistance palestinienne, plus que jamais par le passé. »
Par conséquent, le rôle de l'Iran comme État sponsor numéro 1 du terrorisme est sur le point de s'amplifier. Outre les conséquences de l'allègement des sanctions, les failles que présente l'accord cadre paraissent suffisamment importantes pour que l'Iran demeure un État en passe d'accéder au feu nucléaire.
L'accord sur le nucléaire désactive, sans les détruire, 13.000 centrifugeuses d'enrichissement d'uranium établies sur les sites nucléaires de Natanz et Fordow qui resteront d'ailleurs ouverts.
L'accord laisse le fonctionnement 6.000 centrifugeuses d'uranium aux mains de l'Iran.
Tout aussi inquiétant, l'accord omet de restreindre les programmes iraniens de recherche et de développement sur des centrifugeuses d'uranium plus rapides et plus efficaces, une connaissance qui pourrait être utilisée dans le futur pour passer au stade de la production d'armes nucléaires.
L'accord laisse intact le programme iranien de production et de développement de missiles balistiques à l'origine du mécanisme de production de futures armes nucléaires.
En outre, dans sa forme actuelle l'accord reste vague quant aux inspections intrusives nécessaires au contrôle des activités iraniennes.
Le spectre d'une position régionale renforcée de l'Iran a conduit les États sunnites, sous la direction de l'Arabie Saoudite, à prendre le problème à bras le corps et à lancer l'Opération tempête décisive au Yémen.
Cette campagne militaire aérienne, soutenue par la force navale égyptienne, a été mise sur pied pour faire reculer les rebelles chiites houthis soutenus par l'Iran et sur le point de s'emparer du Yémen avec notamment le détroit stratégique de Bab el-Mandeb par lequel transite une part importante de la production mondiale de pétrole.
L'opération est également un message lancé par des États voisins menacés par les visées expansionnistes de l'Iran pour dire à ce dernier qu'ils ne resteront pas les bras croisés.
Israël de son côté a déclaré qu'il n'était pas lié par cet accord. Ses dirigeants ont d'ores et déjà fait savoir clairement qu'au moindre signe de transgression de la part de l'Iran, l'option militaire sera résolument envisagée.
Certaines voix en Israël soutiennent l'accord, notamment l'ancien chef du Mossad Ephraïm Halevy qui a déclaré que l'accord cadre « prouve que Téhéran a capitulé en acceptant de mener des négociations sur les projets et les infrastructures nucléaires que l'Iran développe depuis des années, principalement en secret, » et en forçant le pays à revoir ses programmes, à détruire de précieux équipements et à réduire drastiquement le nombre de centrifugeuses.
L'Iran était forcé « d'accepter un régime sans précédent de supervision et de surveillance de ses installations nucléaires et du démantèlement des éléments critiques », a dit Halevy.
Les actuels responsables gouvernementaux israéliens rejettent cette analyse. Dans une récente interview, le ministre du Renseignement, Yuval Steinitz, a déclaré que l'Iran sera en mesure de fabriquer la bombe atomique « en temps zéro » dès que l'accord aura expiré dans 10 ou 15 ans [cette date d'expiration est, jusqu'à présent, indéterminée].
En réponse au président Obama qui affirme que l'accord constitue pour l'Occident une garantie contre l'avènement d'une puissance nucléaire iranienne pendant au moins dix ans, Steinitz a déclaré qu'en raison des nombreuse lacunes qu'il comporte, l'accord ne procure pas cette garantie, pas même pour une seule année.
Yaakov Lappin est correspondant au Jerusalem Post pour les affaires militaires et de sécurité nationale. Il est l'auteur de l'ouvrage The Virtual Caliphate (Potomac Books) dans lequel il explique que les djihadistes agissant sur internet sont parvenus à établir un État islamiste virtuel.