Le ministère américain de la Justice « examine soigneusement » l'opportunité d'intervenir dans un procès civil fédéral qui s'est tenu à New York et dans lequel l'Autorité palestinienne (AP) et l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) ont été condamnées à payer 218 millions de dollars pour avoir soutenu et permis l'organisation d'attentats terroristes lors de la Seconde Intifada.
Aux termes de la loi antiterroriste américaine, ces dommages-intérêts pourraient tripler et atteindre la somme de 655 millions de dollars.
La décision quant à l'intervention éventuelle du ministère dans le procès devrait être connue lundi, d'après une lettre envoyée le 27 juillet au juge de district George B. Daniels et dont l'agence Reuters a été la première à parler la semaine dernière.
L'action Sokolow contre OLP avait été intentée par 10 familles américaines dont des proches avaient été tués ou qui avaient elles-mêmes été blessées lors des attentats commis entre 2001 et 2004. Parmi les pièces à conviction, on retrouve des documents internes à l'AP et à l'OLP qui décrivent un programme des paiements destinés aux proches de Palestiniens morts dans des attentats suicides ou détenus dans des prisons israéliennes après avoir été condamnés pour actes terroristes. Alors que l'AP déclare ne plus soutenir les attentats terroristes, des paiements à des familles de terroristes morts ou détenus dans des prisons israéliennes continuent à être effectués.
Certains de ces documents contenaient même des notes manuscrites de celui qui, des années durant, avait dirigé l'OLP et l'AP, Yasser Arafat, approuvant les paiements aux terroristes et à leurs familles. Un rapport de 2002 envoyé au chef du service général du renseignement de l'AP faisait l'éloge d'une escouade de Cisjordanie pour la « réussite d'attentats de grande qualité ».
L'intervention du gouvernement américain en vue d'empêcher les victimes du terrorisme de percevoir les dommages-intérêts de sponsors étrangers n'est pas neuve. Dans l'une des premières affaires du genre, les ministères des Affaires étrangères, de la Justice et des Finances avaient tous trois tenté d'empêcher Stephen Flatow de percevoir les 247 millions de dollars de dommages-intérêts que l'Iran avait été condamné à verser pour avoir financé un attentat suicide du Djihad islamique palestinien qui avait tué la fille de Flatow, Alisa.
« Il est décevant de voir que notre gouvernement est en train d'examiner l'opportunité de s'opposer aux victimes des opérations terroristes de l'OLP », a déclaré Flatow dans un courriel envoyé mardi à l'IPT. « Même s'il est finalement décidé de ne pas intervenir, les actions du gouvernement affaiblissent les droits des victimes. »
En mai, l'AP a déposé une requête visant à suspendre les effets de la condamnation par l'introduction d'un recours contre la somme exigée par le jury. Dans cette requête, les avocats proposent au juge Daniels de demander l'avis du gouvernement à propos de l'impact que pourrait avoir sur l'AP le versement de tels montants. « Les États-Unis ont un intérêt diplomatique majeur à assurer la stabilité de la région », pouvait-on lire dans la requête de l'AP.
Cette requête affirmait aussi que l'AP est « un gouvernement confronté à de graves problèmes économiques » et que toute exécution immédiate menacerait la viabilité de l'AP, qui, à son tour, « mettrait en péril la sécurité et la stabilité de la région. »
Ce qui, selon les avocats des victimes, n'est pas vrai du tout.
« L'AP dispose actuellement de suffisamment d'argent liquide pour verser 60 millions de dollars par an à des prisonniers auteurs de crimes que la défense appelle par euphémisme 'lutte contre l'occupation' (en fait, des terroristes) et pour donner 4,5 millions de dollars à des criminels relâchés – des gens qui ne fournissent absolument aucun service d'une quelconque nature à l'AP », pouvait-on lire dans la réponse à la requête en suspension de l'AP. « En outre – et indépendamment des sommes mentionnées plus haut – l'AP continue à payer les salaires de tous les employés condamnés pour meurtre et tentative de meurtre (ainsi que pour d'autres crimes liés au terrorisme tels que l'appartenance à une organisation terroriste) s'ils étaient employés de l'AP au moment où ils ont commis ces crimes – des gens qui auraient dû être licenciés pour cela mais qui sont au contraire récompensés de leurs crimes alors qu'ils sont en prison et inactifs. » (souligné dans le document original)
Comme le suggèrent les avocats des victimes, l'AP devrait plutôt être sommée de verser à la justice 30 millions de dollars par mois sur une sorte de compte séquestre. Cette solution ne nuirait pas à l'AP, au cas où celle-ci gagnerait en appel, et protégerait en outre les intérêts des victimes sans provoquer de catastrophe financière.
Le sommaire indique que dans d'autres procès similaires, l'AP a été surprise « à transférer des capitaux hors des États-Unis et à refuser de payer les dommages-intérêts [aux plaignants] », attitude qui a suscité de la part du tribunal une injonction ordonnant l'immobilisation des capitaux. L'AP a « depuis longtemps l'habitude de se soustraire à ses créanciers judiciaires américains », justifiant en outre la nécessité du montant des versements.
Le sommaire indique également que « l'AP a caché à la Justice le fait qu'elle possède le 'Fonds d'investissement palestinien' qui, depuis fin 2012, détenait un portefeuille estimé à 782,8 millions de dollars ».
D'après la réponse des plaignants, les tribunaux ont ordonné des versements similaires dans deux affaires plus anciennes visant l'AP.
L'AP crie au loup en présentant des perspectives financières bien sombres. Selon le sommaire, les affaires précédentes, tout comme celle-ci, comportaient « des plaidoyers excessifs soutenus par des déclarations intéressées et juridiquement travaillées émanant de leurs principaux ministres qui prétendaient être au bord du gouffre financier et incapables d'assurer la sécurité ou le dédommagement des plaignants. »
Depuis lors, les finances de l'AP ont connu une forte embellie, avec une collecte d'impôts qui s'est améliorée, passant de 900 millions de dollars en 2007 à 2,1 milliard de dollars l'année dernière.
Quoi qu'il en soit, selon les avocats des plaignants, le tribunal n'a aucun besoin de l'intervention du ministère de la Justice, du ministère des Affaires étrangères ou de toute autre instance gouvernementale. Selon le sommaire, « le Congrès et le Président ont déjà arrêté – par la promulgation de la loi antiterroriste – qu'il est dans l'intérêt des États-Unis de combattre le terrorisme et d'indemniser les victimes du terrorisme en leur versant des dommages-intérêts potentiellement conséquents aux dépens de ceux qui soutiennent le terrorisme international. »
L'avocat Kent Yalowitz a confié à Fox News qu'une intervention du gouvernement reviendrait pour les États-Unis à se placer du côté des terroristes.
Le plaignant Alain Bauer ainsi que sa femme et ses quatre enfants ont été blessés en mars 2001 dans un attentat à la bombe commis dans une rue de Jérusalem par un agent de police de l'AP qui a fait trois morts et 80 blessés.
Bauer confiait à Fox News : « Le gouvernement américain et le ministère de la Justice devraient avoir honte du simple fait d'examiner l'opportunité de déclarer à un tribunal américain que l'OLP et l'AP peuvent se permettre de payer des terroristes condamnés comme tels mais n'ont pas les moyens de dédommager les victimes de ces mêmes terroristes. »